LE
LOTISSEMENT COMMUNAL DE LA BADE :
HISTOIRE
D'UN ECHEC .
Les
chiffres entre parenthèses et en italiques renvoient aux notes qui
se trouvent en fin de texte
En
août 2005, la municipalité ouvrait une enquête publique dont
l'objet était un projet de lotissement sur le site de La Bade. Comme
justification principale de cette initiative : la nécessité de
proposer aux jeunes de Treilles des terrains bon marché. Il
fallait, en sortant du cadre du marché de l'immobilier, permettre à
de jeunes ménages aux revenus modestes d'accéder à la propriété.
Conscients des difficultés rencontrées par les jeunes, dans un
marché devenu délirant, nous étions dès le début favorables au
projet et à son esprit. En revanche, le site proposé pour la
réalisation du projet nous était apparu extrêmement mal choisi.
On ne pouvait pas trouver un lieu moins convenable. Terrain très
pentu, exposé plein nord, sans doute dangereux en cas de très
fortes pluies, exposition au vent record, même pour Treilles. Il
nous est apparu tout de suite que le pari de mettre à disposition
des terrains à faible coût était intenable. Travaux de
terrassements considérables, bassins de rétention,
chaussée-réservoir, escaliers monumentaux, devaient fatalement
conduire à une facture très élevée. Malgré nos réserves
exprimées au moment de l'enquête publique, M. Bouton, pourtant
« du métier », annonçait un prix de vente de
moins de 30 € le m2. Nous étions pour notre part absolument
convaincus que le prix serait beaucoup plus élevé, compte tenu des
travaux nécessaires, et donc incompatible avec la finalité du
projet. La suite de l'histoire nous donna malheureusement raison sur
toute la ligne, car le prix annoncé en novembre 2007 était de
94,04 € le m2. Plus du triple donc. 200 % plus cher que
le prix annoncé. Un record du dépassement prévisionnel. Soit le
maire s'était lancé dans ce projet sans la précaution élémentaire
d'en faire évaluer le coût, et dans ce cas on peut parler
d'incompétence, soit son intention aurait été de tromper les
jeunes du village. Et dans ce cas la raison d'être du lotissement,
permettre à ces derniers d'accéder à la propriété, n'aurait été
qu'un prétexte.
Nous
avions proposé à l'origine de situer le lotissement communal, entre
autres possibilités, dans la zone dite du Petentous qui fait l'objet
actuellement du projet, contestable, de zone artisanale à la sortie
de Treilles (versant maritime). Le terrain de cette zone était idéal
pour proposer des terrains à bas prix. Le lieu est un quasi
plateau avec une pente extrêmement faible. Des travaux de
terrassements beaucoup moins importants, une exposition sud-est,
une vue panoramique sur la mer (c'est d'ailleurs la publicité du
promoteur actuel), la station d'épuration à moins de 400 mètres
derrière, vraiment, un très bon site. L'objection qui nous
avait été faite alors portait sur un éloignement plus important
par rapport au centre du village. En fait, il n'en est rien. Sauf à
vol d'oiseau, mais nous ne sommes pas des oiseaux, La Bade est dans
une fausse proximité avec le village. En voiture, la distance, si on
part depuis le milieu du lotissement de la Bade pour se rendre place
de la Fontaine, est de 800 mètres par le coté « corbières »
et 1100 mètres par le coté mer. Alors que cette zone du Petentous
est à 900 mètres de cette même place. Donc une différence très
faible dans tous les cas de figure et parfaitement négligeable pour
les déplacements automobiles. Car nous voyons bien que les escaliers
monumentaux édifiés le long de la pente de La Bade et qui
endommagent considérablement le paysage tout en étant mal
commodes et même dangereux, ne sont guère fréquentés.
De
toutes ces objections, pourtant raisonnables, rien n'a été retenu
et la municipalité s'est enferrée dans son projet manifestant un
entêtement suspect. L'explication qui a pu en être donnée était
qu'en vérité le site avait été choisi, non pas pour permettre aux
jeunes du village de se loger, mais pour avantager, principalement,
une famille de Treilles très influente au conseil municipal. Et ce
qui devait arriver arriva. Et il en est souvent ainsi lorsque l'on
veut faire passer les intérêts particuliers avant l'intérêt
général. Des trente ménages de jeunes de Treilles candidats
à l'achat de terrain, seulement deux ont pu réaliser leur
projet immobilier (1). Car, toujours en raison du choix
désastreux du site, non seulement les prix des terrains n'étaient
plus ce qui avait été annoncé, mais la construction des
maisons elles-même s'avérait plus coûteuse en raison des
terrassements, fondations, murs de soutènement nécessaires.
Les
acquéreurs des lots « coté antennes » avaient même
l'obligation, pour dégager leur vue ou installer une cour ou une
piscine, de faire de très gros travaux pour creuser la roche de la
montagne. Devant ces devis dépassant toutes les prévisions, la
quasi totalité des jeunes de Treilles ont dû renoncer à construire
sur la Bade dans le lotissement qui pourtant leur était
prioritairement destiné (2).
Premier
et principal échec mais, hélas, pas le dernier, ni le seul. Le
lotissement a donc été lancé il y a maintenant plus de huit
ans. Et il est loin d'être terminé. Cinq lots restent à
vendre (3) et trouvent difficilement preneur. La
municipalité les divise pourtant en deux, à la demande, pour
trouver des acquéreurs. Quant aux maisons effectivement construites,
on est loin du compte car, sur 32 maisons, à peine plus du tiers
sont terminées. En tout, il aura fallu attendre neuf, peut-être dix
ou onze ans pour ce but. Là encore un record ! M. le Maire
invoquera certainement la crise pour justifier ce ratage économique
qui s'est, entre autres, traduit par le paiement d'intérêts
considérables générés par les emprunts contractés par la
commune pour financer les travaux. Plus la vente des lots est lente,
plus l'emprunt dure longtemps et les intérêts s'accumulent. La
crise (qui n'a d'ailleurs fait connaître ses premiers effets qu'en
2009 et 2010) est bien là, c'est certain, mais pourquoi, à Treilles
« sans pareille », est-elle bien plus sensible
qu'ailleurs ? M. le Maire, alors qu'il proposait dans son
lotissement 32 maisons a cru habile de vendre, absolument au même
moment, pour une somme dérisoire (8,90 € le m2) à
un promoteur, un des meilleurs terrains de la commune. Ce dernier
s'est donc trouvé dans la situation de concurrencer le lotissement
communal en proposant une trentaine de lots à construire. Nous avons
perdu le compte des promoteurs qui se sont succédés sur cette
affaire, mais nous avons retenu qu'ils faisaient tous une offre
presque équivalente sur le marché (si on tient compte du moindre
coût de la construction pour les lots des Terrasses de la Bade). A
l'évidence, il s'agissait d'une grossière erreur administrative.
Que penseriez-vous d'un commerçant qui vendrait, pour des
cacahuètes, à un concurrent, une boutique juste en face de la
sienne, afin qu'il y vende, au même prix, des produits de
qualité comparable ? La réponse est facile à faire. Mais
dans le cas qui nous occupe, c'est plus compliqué. On ne peut pas
imaginer qu'un maire aussi calculateur que M. Bouton puisse faire une
erreur pareille. Ne serait-ce pas plutôt la perspective de voir
la S.A.R.L. Bouton s'occuper des terrassements de ce lotissement
privé qui l'aurait conduit, en sa qualité de maire, à céder, ce
terrain à un promoteur (Initialement « Nexity » qui
a assez rapidement « lâché » l'affaire, nous n'avons
jamais trop su pourquoi) ? Tout cela est sans doute légal, il
convient de le préciser. Bien que le conflit d'intérêt soit
évident, il semble qu'en l'état actuel de la législation il n'y a
là rien d'anormal, même si la morale s'en trouve fortement
bousculée.
Quoiqu'il
en soit, l'offre de terrains à bâtir sur Treilles s'est trouvée,
au même moment, très excessive. Ce n'est pas moins de 76 lots qui
furent simultanément proposés entre le communal et le privé (89
actuellement en comptant la zone artisanale, car contrairement aux
apparences, il s'agit bien, de « résidentiel »). Si l'on
compte une moyenne de 3 personnes par maison (ce qui est faible), on
parle alors d'un accroissement de population de 267 habitants.
Rapporté au 180 habitants actuels de la commune c'est plus que
considérable ( près de 150 % d'augmentation!).
Ce
chiffre est à rapprocher des paramètres voulus par le plan
directeur de développement de la région narbonnaise (SCOT).
Celui-ci préconise, dans le but d'éviter une urbanisation
excessive et une destruction trop grande de l'espace naturel
(cadre, rappelons-le, de la première
activité économique de la région : le tourisme), un
taux d'accroissement de la population de 2 % par an ce qui ferait,
pour une période de dix ans, près de 22 %. Sept fois moins que ce
qu'a décidé, dans son coin, M. Bouton. Si tous les maires de la
région agissaient dans le même sens que celui de Treilles « sans
pareille », il faudrait peu de temps pour arriver à une
situation comparable à la situation espagnole : mévente, bulle
immobilière et destruction de l'espace littoral.
Les
Treillois doivent se rappeler que M. Bouton avait présenté lors
d'une réunion publique en 2006, « son » PLU. Celui-ci se
proposait comme objectif à moyen terme d'arriver à une population
de 1600 habitants.
Le
moyen d'y parvenir : entourer le village de toutes une séries
de hameaux judicieusement placés du point de vue de la défense
d'intérêts privés bien représentés au conseil municipal. Les
autorités de tutelle ne s'y sont pas trompées et ont refusé en
bloc ce projet mégalomane, non conforme aux règles élémentaires
du développement durable.
Le
nouveau PLU que M. Bouton a été obligé de présenter, et dont la
procédure d'adoption en cours vient d'être ajournée, a une
apparence plus modeste. On peut cependant craindre,
légitimement, que M. Bouton, gardant en tête sensiblement le même
projet, ait choisi de le réaliser selon la technique dite du
« salami », tranche après tranche. Il est d'ailleurs à
déplorer que , soit par incompétence, soit par calcul,
l'enquête publique nécessaire à l'adoption de ce PLU n'aura lieu
qu'après les élections municipales. Ce qui revient à dire que les
citoyens voteront en mars prochain « à l'aveugle ».
Ce qui n'est pas très démocratique. Treilles « sans
pareille », encore.
L'objectif
avoué par M. Bouton est de porter la population de Treilles à 600
habitants (4). Mais comme il indique par ailleurs qu'il
faut faire trois maisons pour avoir un résident principal, ce n'est
pas moins de 420 maisons qu'il faudra construire ( voir note 5
pour le détail du calcul). Comme les deux lotissements de La Bade ne
représentent « que » 76 constructions, c'est donc près
de 350 maisons qu'il faudra installer sur le territoire de la
commune. Lorsque l'on constate l'impact sur le milieu naturel des
deux lotissements (même pas encore réalisés encore au tiers de ce
qu'ils seront), on peut imaginer, non sans frémir, ce que cela
donnera lorsque s'y ajouteront cinq fois plus de constructions.
Les
justifications données par M. Bouton à cette urbanisation effrénée
sont au nombre de deux. D'abord, permettre l'installation d'un
commerce (épicerie /café). Il se base pour cela sur une étude
remontant à 15 ans qui fixerait, selon lui, à 500 habitants le
seuil de rentabilité. Cette étude trop ancienne ne tient évidemment
pas compte des changements d'habitudes de consommation intervenues
depuis (généralisation des congélateurs, plats surgelés, etc.) et
de l'offre très importante, localement, des grandes surfaces. C'est
donc beaucoup plus de résidents permanents qu'il faudrait installer
pour atteindre ce seuil de rentabilité (6). La
deuxième justification : permettre des rentrées fiscales sous
forme de taxes d'habitations et foncières. Là encore, cela n'a
aucun sens car c'est commettre l'erreur de confondre recettes et
bénéfice. En effet, ces nouvelles constructions occasionnent des
dépenses supplémentaires pour la commune : voiries ,
éclairages, ramassage d'ordures, travaux divers, personnel communal,
nouveaux locaux municipaux (7), etc... Et, au bout du
compte, les recettes nouvelles sont absorbées par les dépenses
supplémentaires.
En
résumé, une étude périmée, et une conception économique fausse,
à l'appui d'un projet dévastateur.
« La
TREILLOISE »
1)
Une partie de ces jeunes a quitté le village pour se
loger ailleurs , suite à cette mésaventure. D'autres, originaires
du village et qui voulaient y revenir, ont renoncé à ce projet.
2)
Pour autant, les ménages qui se sont installés depuis dans les
Lotissements de La Bade (municipal et Terrasses de la Bade) ont toute
notre plus sincère sympathie et
c'est avec beaucoup de plaisir que nous constatons qu'ils ont choisi
le village de Treilles pour résider.
3)
Situation au 1/10 /2013, le chiffre a pu évoluer depuis, mais
sans doute assez peu.
4)
Certains Treillois font valoir que le village au début du siècle
dernier, comptait autour de 450 habitants et donc que cette
population pourrait de nouveau être atteinte. Mais les
situations ne sont pas du tout comparable pour diverses
raisons. D'abord, l'occupation des maisons étaient très
différentes : chaque maison pouvait abriter 8 à 10 personnes
parfois même plus (trois générations cohabitaient couramment :
parents, enfants (en plus grand nombre), grands parents). Ce n'est
évidemment plus du tout le cas actuellement. Toutes ces personnes
n'avaient pas de véhicules automobiles ce qui au regard des
particularités du village a son importance. Et surtout, quasiment
l'ensemble de cette population, enfants mis à part (et encore...),
avait un emploi dans le village même, et, pour la plus grande
partie, dans l'agriculture (vignes, élevages, céréales, etc...).
Ce qui est d'une extrême importance car le village lorsqu'il
accueille de nouveaux habitants doit aussi pouvoir leur proposer
des emplois. Cela est de plus en plus nécessaire compte tenu de
l'évolution du coût des transports (inutile d'en dire davantage
sur le sujet, tout le monde l'a bien mesuré) et, pour ceux qui en
ont le souci, la préservation de l'environnement (pollution,
réchauffement climatique, etc.).
5)
L' objectif visé serait une population de 600 habitants
permanents. Cette catégorie s'élève actuellement à 180
habitants ; on est donc devant une croissance souhaitée de 600
– 180 = 420 habitants. Si on reste sur une moyenne de 3 personnes
par maison, il faudrait construire 420 : 3 = 140 maisons.
Mais
comme, selon M. Bouton, il faut construire 3 maisons pour avoir une
maison correspondant à une occupation permanente, c'est donc le
triple qu'il faudra construire : 140 x 3 = 420 maisons.
6)
Objectif certainement inatteignable même à très
long terme. Et donc d'aucune utilité pour la vie pratique des
habitants actuels et ceux amenés à s'installer à Treilles
prochainement. Nous aurons dans notre programme d'autres
solutions plus réalistes et plus faciles à mettre en place
rapidement.
7)
L'accroissement important de population proposé entraîne de fait
une obligation d'augmenter la taille voire le nombre des locaux
municipaux (Garages, entrepôts, la Mairie elle-même, etc). On
commence par une annexe à la Mairie, et puis il faut poursuivre par
la construction d'une nouvelle Mairie plus grande. De même, il faut
acheter de nouveaux engins, camions, etc. et construire les garages
correspondants. Bref, le mythe de l'enrichissement de la commune par
l'accroissement artificiel de la population n'a pour seul fondement
qu'une
absence d'évaluation des dépenses nouvelles nécessairement
engendrées par l’accueil convenable des nouveaux arrivants.
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